Des Gi's éprouvés

Tout le monde connaît l"horreur que vécurent les GI's à leur arrivée sur la plage d'Omaha. Pour éviter de faire un récit complexe de cette matinée du 6 juin, il est préférable de se contenter  de quelques extraits de témoignages pour comprendre  leur vécu.

Sur les barges
- "les barges ruaient comme des chevaux sauvages et puaient le vomi"
-"Bientôt, nous entendîmes comme un tintement  près de nous et quand deux ou trois hommes s'effondrèrent sur le pont, nous comprimes  que nous étions sur le feu de balles réelles tirées par un ennemi bien vivant"
-"Quand la rampe s'est abaissée, elle fut directement mitraillée. Mes trois chefs de peloton et d'autres furent touchés à l'avant. Deux marins furent touchés. Je suis entré dans l'eau qui ne montait qu'à la cheville. J'ai essayé de courir mais soudain j'ai eu de l'eau jusqu'aux hanches. J'ai rampé pour me cacher derrière l'obstacle en acier enfoncé dans la plage. Les balles ricochaient sur lui et sur mon paquetage, en me manquant. Mais elles en ont atteint d'autres" (un soldat du 116°Rgt)
-"Si un soldat glissait sous la rampe métallique de la barge, il mourrait quand elle retombait"


Gi's dans un LCVP

Dans l'eau
-"Nombreux furent ceux touchés dans l'eau, bon nageur ou non. Ils appelaient à l'aide. Des cadavres flottaient à la surface, et des vivants faisaient le mort, se laissant porter par la marée."
-des balles tombaient dans l'eau à quelques centimètres de moi... jamais je n'ai prié aussi fort de ma vie"
-"Il  (le sergent Robertson) avait une blessure béante à la tempe. Il marchait comme un fou dans l'eau sans son casque. Puis je l'ai vu tomber  à genoux et se mettre  à prier en égrenant son chapelet. Il se plia soudain en deux, touché par des tirs croisés"
-"Je suis touché ! je suis touché !"
-Tout semblait  aller au ralenti, la façon même dont nous nous déplacions sous tout notre équipement. Surchargés, nous n'avions aucune chance. J'étais si fatigué que je pouvais  à peine me traîner."(sur une section de 31 hommes,  9 hommes survécurent)
-"Les balles suintaient en rasant le sable mouillé"
-"C'était horrible. Des hommes mouraient tout autour de nous, les blessés incapables de bouger se noyaient du fait de la marée montante. Jamais je n'ai vu autant de bravoure : beaucoup revenaient sur leurs pas pour tenter de ramener des blessés et se faisaient tuer eux mêmes."


Débarquement à Easy Red


Sur le sable
-"Je leur ai crié de progresser en rampant et certains m'ont obéi. Beaucoup semblaient apathiques. Ils restaient assis ou allongés. Ils pouvaient  remuer les membres mais refusaient de répondre ou d'agir."
-Ils étaient étendus sur les galets mouillés, tremblants de froid et de peur"
- "Il (Caporal E O Jones)avec sa frêle carrure partit six fois et ramena des hommes" 
-"Certains secteurs de plage étaient bondés, d'autres non occupés"
-"Toubib, je suis touché. A l'aide ! "
- A 9 heures, ce n'était qu'un énorme amas de ferraille, d'hommes et de matériel"
-"Rien de tout cela me semblait  réel"


Remarquer  à gauche les Gi's se protégeant derrière un char (photo Capa)



Les conditions particulièrement atroces du débarquement à Omaha, que tous les témoignages attestent, révèlent les conséquences terribles d'une accumulation d'erreurs et de manque de chance.

Rien à voir avec la légende selon laquelle les hommes débarquèrent sans crainte sous le feu de l'ennemi ou avec la version édulcorée de la mort sur la plage dans le film "Le jour le plus long".
Très vite, l'on déchanta: premières balles, blessés et morts firent très vite apparaître la peur, et pour certains la folie, pour d'autres,   des commotions cérébrales tant la violence était omniprésente. Le choc psychologique fut terrible avec la prise de conscience de sa propre vulnérabilité, que la mort peut arriver très vite et que pour l'éviter, la prudence ne suffit pas, il faut de la chance.

Les Gi's pensaient pouvoir trouver un combat tel qu'il leur avait été appris lors de l'entrainement. Ce ne fut pas le cas et le sentiment de désespoir et d'égarement était là pour des hommes épuisés et sans repères. Aucun Gi n'a pu oublier les images insoutenables des blessés et des morts, du sang, des cris, des odeurs, le bruit terrifiant des explosions et balles qui sifflent.
Aussi beaucoup ont-ils craqué nerveusement, physiquement ou psychologiquement, à des degrés divers.
Lire, en complément notre dossier sur "les pertes psychiatriques"