La pointe du Hoc : un assaut meurtrier inutile ?
La pointe du Hoc se compose d'une falaise de 25 à 30 mètres de haut précédée d'une aiguille qui s'avance dans la mer, située sur la commune de Cricqueville-en-Bessin. Située entre les plages d'Utah Beach et d' Omaha Beach, la pointe avait été fortifiée par les Allemands (WN 751) et, selon les reconnaissances aériennes alliées, était équipée de pièces d'artillerie lourde dont la portée menaçait les deux plages voisines. Il avait été jugé primordial, pour la réussite du débarquement, que les pièces d'artillerie soient mises hors service le plus rapidement possible. Cette mission fut confiée au 2e bataillon de Rangers américain
Jean Quellien interroge : « La grande question, c’est pourquoi les Américains ont donné l’assaut ». Les Allemands avaient bien positionné 6 canons sur le site de la pointe du Hoc. L’un des canons a été détruit par l’aviation le 15 avril. Les cinq autres ont été reculés à l’intérieur des terres. « Ce déménagement nocturne ne passe pas inaperçu. La résistance locale est alertée par les habitants d’une ferme », indique Jean Quellien. L’information parvient à Guillaume Mercader, responsable du réseau de résistance Centurie pour le Bessin qui estime que l’information est capitale. Elle est transmise aux alliés dés le 26 avril 1944. « Ils décident de maintenir l’opération qui doit être conduite par le major C.A Lytle". Celui-ci prend vite conscience du danger inutile que représente cet assaut. A bord du HMS Ben M My Chree, il boit un peu trop et déclare que la mission est "inutile et suicidaire". Emmené à l'infirmerie, il montre un croquis qui montre que les canons ont été déplacés à l'intérieur des terres. Informé de cet incident le colonel Ridder quitte l'USS Ancon pour se rendre à bord afin d'éviter que cette information ne s'ébruite. Une bagarre se serait déroulée entre Lytle, les officiers, le personnel médical ; le captain Block, médecin, est mis par K.O par Lytle qui sera maîtrisé. Il sera démis de ses fonctions puisqu'incapable de diriger de manière convaincante une attaque en laquelle il ne croit pas, et fut transféré à la 90° DI où il reçut la "Distinguished Service Cross". Rudder décide de mener la mission malgré le général Huebner qui veut l'en dissuader
L'assaut de la pointe du Hoc par les rangers fut meurtrier, ce qui semble inévitable par la configuration du site à attaquer. Le 7 Juin, sur 225 rangers débarqués, les pertes sont de 135 hommes.
Aujourd'hui, l''utilité de cette opération est donc remise en cause d'autant que les bombardements aériens du 15 avril 1944, du 4 juin (100T de bombes) du 5 juin par 35 B-17 (100T de bombes) et du 6 juin (bombardement naval préliminaire à 5 h 50, tiré par les USS Texas, USS Satterlee et HMS Talybont, suivi par une vague de 19 B-26 Marauder de la 9e Air Force) avaient détruit l'essentiel du matériel et des défenses.
Les chars duplex drive: un raté !
Le char, une nécessité pour toute opération militaire, est nécessaire pour le débarquement complexe à Omaha. Il était prévu, avant l'arrivée Gi's, à H-5 (6H25), que 112 chars shermans se positionnent tous les 50 m, pour tirer avec mitrailleuses et canons de 75 mm sur les WN afin de protéger l'arrivée des Gi's sur le sable.
Le char Sherman est-il fiable ? Le Sherman M4 est très performant en combat, avec une très bonne fiabilité mécanique. Doté d’un bon blindage et équipé d’un canon de 75 mm, il jouit d’excellentes capacités motrices. En revanche, il a aussi des défauts car en combat dès qu’il est touché, sa réserve de munition prend souvent feu, pour cette raison les équipages le surnommaient le « briquet Ronson ».
Pour faire parvenir, aussi tôt, ces chars sur la plage, on inventa le char "duplex drive" : ces Chars DD sont de classiques chars Sherman de 32 T mais avec une jupe de caoutchouc et de toile tendue pour la flottaison avec une transmission Duplex Drive par 2 hélices-gouvernail pour naviguer à 8km/h. Cette idée innovante, inventée par les anglais, était particulièrement ambitieuse. Mais ce équipement en toile est fragile et nécessite une mer de force 3 maximum avec un courant maximum 3 à 4 nœuds, en effet la toile déborde de seulement 30 cm au dessus du niveau de la mer : ces limites des chars étaient connues et craintes par les officiers. Or, le 6 juin, les vents étaient de 11 à 12 nœuds ce qui entraînait une mer de force 4 avec des creux de plus de un mètre, plus souvent 1,5 mètre.
Ainsi 16 LCT (T pour tank) doivent lancer 64 Shermans Duplex drive (DD) par navigation à 5 km de la côte pour atterrir à H-5 (6H25), dirigé par le 741st tank battalion avec 32 DD sur l'est de la plage (Colleville) et par le 743rd tank battalion avec 32 DD sur l' ouest de la plage (Vierville).
S'ajoutaient 16 LCTA (surblindés) qui déposeraient sur le sable 48 autres shermans à 6H20. Un LCT supportait 2 chars shermans classiques et 1 tankdozer avec lame bulldozer, tous étanchéifiés pour se mouvoir dans 2 m d'eau.
L'on connaissait les difficultés de cette réalisation, aussi les décisions de dernière minute devaient être prises par le capitaine le plus ancien en grade du bataillon, aves deux problématiques : quand lâcher en mer les chars, quand débarquer sur la plage.
Vers Collevile, le 741st tank battalion avec ses deux capitaines (cie B & Cie C), bien qu'ils n'aient jamais connu à l'entraînement une telle situation, jugent nécessaire de prendre le risque de mettre à l'eau les chars DD : les 3 premiers shermans (34T) coulent mais on continue ! Tous les chars de la compagnie C ont coulé provoquant déjà de lourdes pertes humaines et seuls, finalement, 2 chars de la Cie B parviendront sur le sable. Le LCT 600 parviendra a déposé 3 chars.
La perte est de 27 chars sur 32 et 33 hommes (beaucoup ont pu être repêchés).
Vers Vierville, les 2 Capitaines du 743rd tank battalion prennent une décision opposée en décidant d'apporter en LCT tous les 32 chars sur la plage qui arrivent vers 6H40. Un LCT saute sur une mine ce qui provoque une perte de 4 chars et de beaucoup de militaires.
Quant aux 16 LCTA, ils se retrouvent dispersés dans l'obscurité lors de la traversée (2 coulent et 4 arriveront avec retard) et seuls 10 livrent environ 20 chars à 6H30
Au final, environ 47 chars (sur 112) se retrouvent sur Omaha, ils ont du mal à se mouvoir au travers des obstacles, sur le sable et l'eau de mer de la marée montante noie beaucoup de moteurs. Treize sont détruits ou avariés par les canons antichars de 88, certains doivent reculer s'abriter dans la mer… et attendent l'infanterie !
Vers 7 h, il en resterait seulement 34 qui barbotaient dans le ressac, bien en vue des canons allemands.
Plus tard le général P Hobart, inventeur du char amphibie disait : "les américains s'en sont servis n'importe comment". Aujourd'hui encore, A Beevor continue à se demander si les chars DD étaient vraiment la solution indiquée pour soutenir l'infanterie, à Omaha.
Rien ne se passa donc comme prévu, comme pour les bombardements. Désormais tout repose sur les fantassins qui vont débarquer : ils vont payer très cher ces échecs à répétition.
Malchance et imprévus
Dérives
Le débarquement était planifié avec une rigueur et précision absolues. Chaque compagnie avait un objectif précis à réaliser, fallait-il encore débarquer au bon endroit !
Presque toutes les embarcations ne purent arriver à l'endroit prévu en raison, d'une part de l'absence d'amers (repères) pour les pilotes de barges en raison de la fumée des broussailles et poussière qui enveloppaientt le littoral, et, d'autre part, la présence d'un fort courant côtier qui faisait dériver les chalands vers l'est.
Ainsi, face à Vierville doivent débarquer les remières vagues du 116TH, les Cies F et G sur 12 LCP, en fait elles se retrouvent à l'est, au niverau de Saint Laurent, face aux Moulins et éparpillés. Le pire sera pour la Cie E dont des LCP se retrouvent à 1,5 km et 3 km vers l'est, pas loin de Port en Bessin.
Jean Quellien interroge : « La grande question, c’est pourquoi les Américains ont donné l’assaut ». Les Allemands avaient bien positionné 6 canons sur le site de la pointe du Hoc. L’un des canons a été détruit par l’aviation le 15 avril. Les cinq autres ont été reculés à l’intérieur des terres. « Ce déménagement nocturne ne passe pas inaperçu. La résistance locale est alertée par les habitants d’une ferme », indique Jean Quellien. L’information parvient à Guillaume Mercader, responsable du réseau de résistance Centurie pour le Bessin qui estime que l’information est capitale. Elle est transmise aux alliés dés le 26 avril 1944. « Ils décident de maintenir l’opération qui doit être conduite par le major C.A Lytle". Celui-ci prend vite conscience du danger inutile que représente cet assaut. A bord du HMS Ben M My Chree, il boit un peu trop et déclare que la mission est "inutile et suicidaire". Emmené à l'infirmerie, il montre un croquis qui montre que les canons ont été déplacés à l'intérieur des terres. Informé de cet incident le colonel Ridder quitte l'USS Ancon pour se rendre à bord afin d'éviter que cette information ne s'ébruite. Une bagarre se serait déroulée entre Lytle, les officiers, le personnel médical ; le captain Block, médecin, est mis par K.O par Lytle qui sera maîtrisé. Il sera démis de ses fonctions puisqu'incapable de diriger de manière convaincante une attaque en laquelle il ne croit pas, et fut transféré à la 90° DI où il reçut la "Distinguished Service Cross". Rudder décide de mener la mission malgré le général Huebner qui veut l'en dissuader
L'assaut de la pointe du Hoc par les rangers fut meurtrier, ce qui semble inévitable par la configuration du site à attaquer. Le 7 Juin, sur 225 rangers débarqués, les pertes sont de 135 hommes.
Aujourd'hui, l''utilité de cette opération est donc remise en cause d'autant que les bombardements aériens du 15 avril 1944, du 4 juin (100T de bombes) du 5 juin par 35 B-17 (100T de bombes) et du 6 juin (bombardement naval préliminaire à 5 h 50, tiré par les USS Texas, USS Satterlee et HMS Talybont, suivi par une vague de 19 B-26 Marauder de la 9e Air Force) avaient détruit l'essentiel du matériel et des défenses.
Les chars duplex drive: un raté !
Le char, une nécessité pour toute opération militaire, est nécessaire pour le débarquement complexe à Omaha. Il était prévu, avant l'arrivée Gi's, à H-5 (6H25), que 112 chars shermans se positionnent tous les 50 m, pour tirer avec mitrailleuses et canons de 75 mm sur les WN afin de protéger l'arrivée des Gi's sur le sable.
Le char Sherman est-il fiable ? Le Sherman M4 est très performant en combat, avec une très bonne fiabilité mécanique. Doté d’un bon blindage et équipé d’un canon de 75 mm, il jouit d’excellentes capacités motrices. En revanche, il a aussi des défauts car en combat dès qu’il est touché, sa réserve de munition prend souvent feu, pour cette raison les équipages le surnommaient le « briquet Ronson ».
Pour faire parvenir, aussi tôt, ces chars sur la plage, on inventa le char "duplex drive" : ces Chars DD sont de classiques chars Sherman de 32 T mais avec une jupe de caoutchouc et de toile tendue pour la flottaison avec une transmission Duplex Drive par 2 hélices-gouvernail pour naviguer à 8km/h. Cette idée innovante, inventée par les anglais, était particulièrement ambitieuse. Mais ce équipement en toile est fragile et nécessite une mer de force 3 maximum avec un courant maximum 3 à 4 nœuds, en effet la toile déborde de seulement 30 cm au dessus du niveau de la mer : ces limites des chars étaient connues et craintes par les officiers. Or, le 6 juin, les vents étaient de 11 à 12 nœuds ce qui entraînait une mer de force 4 avec des creux de plus de un mètre, plus souvent 1,5 mètre.
Ainsi 16 LCT (T pour tank) doivent lancer 64 Shermans Duplex drive (DD) par navigation à 5 km de la côte pour atterrir à H-5 (6H25), dirigé par le 741st tank battalion avec 32 DD sur l'est de la plage (Colleville) et par le 743rd tank battalion avec 32 DD sur l' ouest de la plage (Vierville).
S'ajoutaient 16 LCTA (surblindés) qui déposeraient sur le sable 48 autres shermans à 6H20. Un LCT supportait 2 chars shermans classiques et 1 tankdozer avec lame bulldozer, tous étanchéifiés pour se mouvoir dans 2 m d'eau.
L'on connaissait les difficultés de cette réalisation, aussi les décisions de dernière minute devaient être prises par le capitaine le plus ancien en grade du bataillon, aves deux problématiques : quand lâcher en mer les chars, quand débarquer sur la plage.
Vers Collevile, le 741st tank battalion avec ses deux capitaines (cie B & Cie C), bien qu'ils n'aient jamais connu à l'entraînement une telle situation, jugent nécessaire de prendre le risque de mettre à l'eau les chars DD : les 3 premiers shermans (34T) coulent mais on continue ! Tous les chars de la compagnie C ont coulé provoquant déjà de lourdes pertes humaines et seuls, finalement, 2 chars de la Cie B parviendront sur le sable. Le LCT 600 parviendra a déposé 3 chars.
La perte est de 27 chars sur 32 et 33 hommes (beaucoup ont pu être repêchés).
Vers Vierville, les 2 Capitaines du 743rd tank battalion prennent une décision opposée en décidant d'apporter en LCT tous les 32 chars sur la plage qui arrivent vers 6H40. Un LCT saute sur une mine ce qui provoque une perte de 4 chars et de beaucoup de militaires.
Quant aux 16 LCTA, ils se retrouvent dispersés dans l'obscurité lors de la traversée (2 coulent et 4 arriveront avec retard) et seuls 10 livrent environ 20 chars à 6H30
Au final, environ 47 chars (sur 112) se retrouvent sur Omaha, ils ont du mal à se mouvoir au travers des obstacles, sur le sable et l'eau de mer de la marée montante noie beaucoup de moteurs. Treize sont détruits ou avariés par les canons antichars de 88, certains doivent reculer s'abriter dans la mer… et attendent l'infanterie !
Vers 7 h, il en resterait seulement 34 qui barbotaient dans le ressac, bien en vue des canons allemands.
Plus tard le général P Hobart, inventeur du char amphibie disait : "les américains s'en sont servis n'importe comment". Aujourd'hui encore, A Beevor continue à se demander si les chars DD étaient vraiment la solution indiquée pour soutenir l'infanterie, à Omaha.
Rien ne se passa donc comme prévu, comme pour les bombardements. Désormais tout repose sur les fantassins qui vont débarquer : ils vont payer très cher ces échecs à répétition.
Malchance et imprévus
Dérives
Le débarquement était planifié avec une rigueur et précision absolues. Chaque compagnie avait un objectif précis à réaliser, fallait-il encore débarquer au bon endroit !
Presque toutes les embarcations ne purent arriver à l'endroit prévu en raison, d'une part de l'absence d'amers (repères) pour les pilotes de barges en raison de la fumée des broussailles et poussière qui enveloppaientt le littoral, et, d'autre part, la présence d'un fort courant côtier qui faisait dériver les chalands vers l'est.
Ainsi, face à Vierville doivent débarquer les remières vagues du 116TH, les Cies F et G sur 12 LCP, en fait elles se retrouvent à l'est, au niverau de Saint Laurent, face aux Moulins et éparpillés. Le pire sera pour la Cie E dont des LCP se retrouvent à 1,5 km et 3 km vers l'est, pas loin de Port en Bessin.
Dérives vers l'Est des premières vagues
Ainsi les Gi's qui purent débarquer se retrouvaient dans des secteurs inconnus, certaines compagnies étant à plus d'un ou deux kilomètres de leur objectif. C'était donc la pagaïe tant les les hommes étaient éparpillés.Toutes les équipes formant théoriquement un élément combattant autonome avaient perdu leur cohésion péniblement acquise lors de l'instruction." Sur la plage bouleversée et encombrée les équipes se mélangèrent et graduellement se sont écartées" (St T Fettinger). Désormais les hommes survivants sont isolés, perdus, en retard, c'est la confusion totale.
Ces détournements involontaires vers l'Est évita aux compagnies d'attaquer de face l'entrée des valleuses, ce qui avait été planifié et qui était une erreur stratégique, ce fut donc une bonne chose. Ainsi, dans la matinée, quelques petits groupes d' hommes parvinrent à grimper sur le plateau entre les valleuses pour ensuite attaquer par revers les entrées des quatre vallées avec réussite.
Sable
Sable et eau malmenèrent aussi les Gi's. Lorsque les Gi's sortent de leur chaland, ils se retrouvent avec beaucoup d'eau, souvent au niveau des épaules. La plage n'est pas lisse, elle présente de nombreux trous d'eau, et, surtout, des creux invisibles particulièrement dangereux. En effet les plages en Normandie ont une morphologie spécifique due à deux courants : les vagues arrivent et déferlent sur la plage induisant un transport d'un sable très fin vers la plage et d'autre part le ressac amène du sable qui va de la plage vers le large. La convergence de ces courants provoque une accumulation de sable qui forme une barre dont l' avant présente une zone plus profonde surcreusée par les vagues et les marées, cette dépression s'appelle en Normandie, une bâche et en arrière de cette bâche, la barre. Le phénomène de barre et de bâche a bien été étudiée principalement par les Américains dans l’optique du Débarquement. Cela a pourtant posé problème lors du D-Day. Les engins amphibies qui ont débarqué ont buté sur une première barre sableuse, puis les soldats en posant pied avaient plusieurs bâches à traverser avec de l’eau profonde.
Les conséquences sont multiples.
Eau
Les GI's étaient surchargés, en théorie, ils devaient avoir environ 20 kg d'équipement dans leur paquetage, en fait ils en portaient beaucoup plus, souvent plus de 30 kg, en effet les Etat Major avaient rajouté, au dernier moment, grenades, gilets de sauvetage, imperméables, munitions... L'un aurait porté 750 balles de mitrailleuses en plus de son équipement. Ainsi surchargés, mouillés, entraînés par ce poids, beaucoup coulèrent à pic en sautant des péniches. D'autres se sont noyés, incapables de se mouvoir dans la mer houleuse avec leur équipement mouillé qui pesait encore plus lourd et qui les empêchait de nager d'autant s'ils avaient été blessés en sortant des barges. Aucune statistique officielle ne l'indique, mais des estimations officieuses indiquent qu'un quart des pertes seraient consécutives à une noyade. L'historien A Beevor indique: "Beaucoup d'hommes estimèrent que les pertes auraient été divisées par deux si la première vague avait attaqué avec un paquetage moins lourd!"
Paquetages de GI (Musée de l'armée)
Difficultés et problèmes s'accumulent !
Démolition des obstacles par le Génie
Il s'avère donc nécessaire de faire disparaître tous les obstacles de la page pour débarquer en ininterrompu hommes et matériel par des sapeurs de l " Engineer Battalions"
Un plan de démolition est préparé. Après la première vague et l'arrivée des chars DD, à H+3 soit 6h33 plus de 1000 sapeurs doivent arriver :16 équipes de 42 hommes sur 24 LCM aidés de 16 Tank Dozers déchargés de LCTA débarqueront pour ouvrir 16 brèches géantes de 45 m de large à 180m d'intervalle dont le centre sera indiqué par des bouées avec un fanion vert. Le timing est court de 30 à 60 minutes car la marée va monter. A H+8 (6h38) 10 équipes d'appui doivent venir en soutien.
L'équipement a été particulièrement étudié. Chaque sapeur porte 20 kg de tnt ou C2 plastic, 1 fusil ou carabine ou porte des torpilles bangalore, des cordeaux détonants et des grenades fumigènes.
Seuls 22 LCM arrivent à l'heure mais avec les courants sont déportés à 1 km vers l'est, du coup les équipes sont concentrées et regroupées en 2 endroits : entre Saint Laurent et Vierville et entre le Ruquet et Colleville (voir carte). Ainsi l'équipe C devait se présenter devant Dog Red et se retrouve sur Fox red
Le débarquement s'effectue sous un feu intense avec obus, bombes, mitrailleuses : chalands et hommes sont touchés par les explosions. Les sapeurs font du mieux mais connaissent de très lourdes pertes (35 à 40 %) ainsi l'équipe N° 11 perd plus de la moitié de son effectif, les équipes 12 à 16 sont toutes gravement atteintes soit par le feu nourri des mitrailleuses, soit par des obus. Seuls 6 engins sur 16 (tank bulldozer) échappent à la destruction mais seront détruits plus tard. La team 2 de renfort arrive avec 1 heure de retard.
Sur les 16 brèches à réaliser, seules 6 brèches partielles sont effectuées : 4 sur Easy et 2 sur Dog entre Viervile et Saint Laurent, mais malheureusement une seule est bien signalée avec le fanion vert sur Dog. En fait, seul le côté Est d'Omaha a bénéficié du travail des sapeurs qui sera exploité qu'en fin de matinée lorsque la situation sera moins confuse.
Sapeur et brèches
L'échec (partiel) du génie est dû à une série de problèmes qui se sont accumulés, consécutifs aux échecs précédents : erreurs de navigation, arrivée sur une plage encombrée sous le feu allemand continu, destruction de leur propre matériel, difficulté pour avancer pour des sapeurs épuisés et surchargés d'équipement qui sont cloués sur place, planning trop rigoureux qui apporte sans cesse des hommes sur la plage, incapables de faire leur mission. Dans la confusion, les sapeurs du génie se serviront plus des fusils que des pelles et détecteurs...et certains "formèrent des compagnies d'infanterie improvisées" Cap Howard
Sous évaluation des forces allemandes
Bien qu'impressionnés et abasourdis par les bombardements massifs qui passèrent au dessus de leurs têtes, les allemands se sont resaissis rapidement à la vue du débarquement et firent crépiter leurs mitrailleuses MG-42. Leur résistance et acharnement étonnèrent les GI's.
Les américains ont-il sous évalué leurs forces derrière Omaha ?
Le littoral d'Omaha Beach est occupé depuis 1942 par divers éléments de la 716° Infanterie Division qui se succèdent sur place ; cette 716° occupe également les secteurs voisins d'Isigny, Canisy, Bayeux, Molay littry, soit un effectif d'environ 7771 hommes étalés entre la Vire et l'Orne.. A noter que cette 716° DI est réputée pour sa faiblesse en raison de la présence de trois "ostbataillonen" formés d'anciens prisonniers de l'armée rouge peu motivés pour combattre, ce que savaient les américains.
La 352° DI (7500 hommes) est arrivée plus tardivement, au début d'année 1944, en provenance de la région de St Lô mais seuls trois bataillons étaient positionnés à proximité d'Omaha ( 2 bataillons d'infanterie et un bataillon d'artillerie légère). Le reste est dispersé dans l'arrière pays
Ce mouvement semble passer totalement inaperçu des Alliés. L'information avait pourtant circulé dans le Haut Commandement allié (SHAEF), notamment dans la synthèse hebdomadaire du 21e Groupe d'armées (21st Army group weekly Neptune Intelligence Review) daté du 3 mai 19444.J Balkoski évoque la découverte de cette 352° division le 4 juin au soir, soit 30 heures avant le débarquement ! [lire notre dossier complet]
Les américains ont donc pu sous évaluer les forces allemandes dans le secteur, mais il semble difficile de l'évaluer avec précision. Ils pensaient que cette 352° DI était restée sur Vire à 60 km de la côte mais en fait seuls quelques bataillons étaient présents à proximité d'Omaha. Dans tous les cas, du fait de la présence de plusieurs débarquements, les allemands furent déconcertés, ainsi un groupe de réserve de la 352° DI, basé près de Bayeux, fut-il envoyé à 3h15 vers Carentan... Heureusement, cela a permis d'éviter un probable désastre mais n'a pas évité un affrontement redoutable et très meurtrier.
La capacité des Gi's à surmonter toutes ces difficultés est tout à fait exceptionnelle : obstacles non détruits par les bombardements, pluie de balles et d'obus allemands, horreur de voir ses camarades blessés ou morts, impuissance des sapeurs dans une confusion totale. Il leur a fallu beaucoup de courage et de témérité, personne ne peut le nier ; sortir vivant d'Omaha était un exploit, même s'il fallait aussi avoir de la chance.
C'est ce qui a forgé la légende d'Omaha, devenue une bataille exceptionnelle, mythifiée, dont l'analyse critique, aujourd'hui, est délicate à mener, même si elle concerne uniquement l'aspect stratégique avec des erreurs ou imprécisions de décisions prises en haut lieu qui ont eu des conséquences énormes sur les pertes humaines.
Le mythe prend ses racines dans de multiples considérations.
Les pertes énormes, en une journée, pour l'armée américaine, probablement le bilan le plus lourd depuis l'entrée en guerre des USA (1348 jours), demeurent le fondement du mythe : avoir surmonté dans la douleur et le sang.
Le déroulement de la journée est une épreuve à rebondissements qui est à l'image de la mentalité américaine ; un exemple, aujourd'hui, les entreprises sont renommées pour leur «Early Adopters» ceux qui osent et testent de nouvelles solutions sans se soucier du «legacy»… des vrais "disrupteurs" qui en fait existaient déjà en 1944 ! .
Ainsi ce 6 juin commence par un désastre qui voit des Gi's massacrés, aussi change-t-on les plans officiels qui ne fonctionnent pas (attaque de front face à l'entrée des valleuses) pour contourner ou infiltrer les lignes adverses toujours avec combativité et la volonté absolue de réussir malgré l'épuisement et les épreuves, et, obtenir au final, la victoire en outrepassant avec pugnacité des difficultés apparemment insurmontables.