Autres débarquements, des retours d'expériences malheureuses mais utiles ?

Le débarquement est une opération militaire amphibie visant à déposer sur une côte des soldats et du matériel militaire depuis des navires en vue d'une invasion, il s'agit d'une opération délicate qui nécessite un déroulement précis d'opérations spécifiques adaptées à l'environnement avec un préliminaire obligatoire de bombardements des défenses ennemies. Depuis longtemps, cette technique de conquête a été utilisée avec plus ou moins de succès mais ce sont les les forces alliées lors de la Seconde Guerre mondiale qui ont utilisé au maximum cette opération en essayant par l'expérience d'en améliorer la technique.
Aujourd'hui, évoquer le "débarquement" revient, pour tout un chacun, de parler du débarquement du 6 juin 1944 en Normandie, et si l'on doit citer une seule plage, il s'agit toujours d'Omaha.
Il convient donc d'analyser les nombreux débarquements du XX° afin de savoir si les expériences des  précédents débarquements ont été utiles et comprendre pourquoi un seul débarquement est devenu mythique.





Parmi les très nombreuses opérations militaires de la seconde guerre mondiale, sont  sélectionnés les principaux débarquements qui seront analysés afin d'expliciter les raisons des difficultés rencontrées qui devraient permettre d'avoir, avec l'expérience, en Normandie, un débarquement sans failles :

-25 avril 1915 : Gallipoli (Dardanelles) présenté car il s'agit du premier grand  débarquement allié du XX°. Un échec pour ce premier débarquement lié  à l'inexpérience. La plage est comparable  à celle d'Omaha et déjà  des embarcations  seront remplies de cadavres avant d'arriver. Fin décembre 1915, c'est l'évacuation. Les pertes pour les alliés sont de 250.000 hommes  dont 60.000 lié aux maladies (dysenterie et  typhoïde)

-15 avril  et 15 mai  1940 Narvik ( Norvège) deux  débarquements  franco-britanniques mais les armées doivent quitter Narvik début juin avec des pertes de 5000 hommes.

-23 septembre 1940 : Dakar, affrontement naval franco-britannico-français, un échec complet, largement évitable et inutile, engendre la mort de 203 français pour 393 blessés

-19 Août 1942 : Dieppe, un désastre, avec 6 086 soldats alliés (canadiens et britanniques) engagés,  les pertes sont de 4 397 hommes.

-8 Novembre1942 : Torch en Afrique du Nord,  débarquement sur 5 plages en Algérie et Maroc. Seul Alger est pris facilement, ailleurs des affrontements avec l'armée française mais un cessez le feu arrive dès le  10 novembre. Les pertes  alliées sont de  550 hommes et les Français ont perdu 1 500 morts et  des milliers de blessés.

-10 juillet 1943 :  Husky  en Sicile avec plusieurs secteurs de débarquement mais avec les contre attaques et la montagne, l'avancée est laborieuse. Le 16 Août les allemands évacuent la Sicile. Les Alliés  ont des pertes de 24.000 hommes et  37.000 pour les allemands.

-3 sept 1943 : en Italie, Opération Avalanche (et Opérations de diversion  Shingle et Slapstick). Près de Salerne, deux secteurs de débarquement.  Une tête de pont minuscule est créée et tenue avec difficulté en raison des contre attaques, il faut bombarder  pour faire reculer les allemands sur la ligne Gustav. Les Alliés perdent 15 000 hommes et les Allemands 8 000

-22 janvier1944 :  en Italie débarquements à Anzio & Nettuno. Pour  débloquer la ligne Gustav, les alliés débarquent facilement sur 5 plages autour  d'Anzio, mais la tête de pont se retrouve vite encerclée, la situation s'enlise pour l'hiver. Mi mai les alliés reprennent l'offensive et Rome sera libérée.
L’addition des pertes humaines alliées s’allonge de 40 000 hommes. Les Allemands, quant à eux, déplorent 35 000 morts.

-20 Novembre 1943:  dans le Pacifique, opération Galvanic avec débarquements à  Tarawa  et Makin. La conquête de ces atolls est très difficile et coûte la perte de 100 marines à Tarawa en trois jours, désormais surnommée "Bloody Tarawa".

=> Lire notre  étude détaillée de tous ces débarquements


  • Analyse de ces expériences

Tous les débarquements alliés de la deuxième guerre mondiale (et celui de 1915 à Gallipoli) ont été analysés par les Etat major alliés afin d'en tirer des leçons  pour l'avenir.

-Préparer
L'une des causes principales des échecs est l'impréparation du débarquement avec des objectifs très mal définis (Gallipoli, Dakar, Dieppe, Anzio) qui le  transforme en une vaste improvisation  qui se révèle fatale, de même  il ne faut pas  multiplier les objectifs comme en Italie. D'autant qu' à chaque fois des problèmes de coordination et de communication  (Dakar, Italie) entre  les divers participants empêchent  les bonnes prises de décision.

Il est vital de connaître sa géographie, ce ne fut pas toujours le cas, comme à Gallipoli  ou Tarawa où  sans renseignements efficaces et  avec des cartes médiocres, on rate les objectifs.  Il faut d'abord choisir le bon endroit pour débarquer, ainsi le site de Dieppe se révèle un très mauvais choix : le point de débarquement est une côte inhospitalière bordée par des plages de galets que surplombent les parois verticales de falaises truffées de défenses de toutes sortes : batteries de canons, mortiers, nids de mitrailleuses, bunkers, réseaux de fil de fer barbelé. De même le débarquement à   Gallipolli sur des  plage dominée par de hauteurs ou se situe l'ennemi fut une erreur.  Le débarquement les plus difficiles eut lieu à la plage « V » située en contrebas d'une ancienne forteresse et sur la plage « W » à la pointe occidentale de la péninsule. Ensuite contourner les positions fortifiées ottomanes fut trop compliqué en raison du tir nourri de l'artillerie et des mitrailleuses Les Alliés furent donc incapables de contrôler les hauteurs de la péninsule où les Ottomans disposaient de positions en surplomb des forces alliées confinées aux plages.

L’expérience acquise à Dieppe comme en Afrique du Nord, notamment à Oran, montre que l’assaut frontal pour la prise d’un port est voué à l’échec. L'idée d' attaquer un port, toujours très bien défendu,  est désormais exclue

Il faut aussi que le lieu soit proche de bases navales et aérodromes afin de pouvoir facilement intervenir. Ainsi, malgré la prise de Narvik, le commandement allié, conscient de la difficulté de poursuivre l’opération aussi loin des bases britanniques, sans aérodromes, et face à la situation des armées en France, décide l’évacuation du corps expéditionnaire en juin 1940

Un site spécifique, comme un atoll dans le Pacifique nécessite, par ses contraintes,  une bonne connaissance des lieux et une  stratégie adaptée. A Tarawa, pour débarquer les Américains utilisent des LVT (landing vehicle tank) à faible tirant d'eau pour franchir la barrière de corail séparant l'océan du lagon. En outre le débarquement ne peut se faire qu'à marée haute et faute de connaissances sur les fonds marins autour de Tarawa, les Américains ne peuvent être sûrs de leur coup. Il arrivera donc qu"on ne puisse débarquer sur la plage et que les soldats  franchissent le lagon avec de l'eau jusqu’à la taille, voire jusqu'aux épaules.

Le bon moment est vital que ce soit pour la météo, ainsi en Sicile le mauvais temps (vent) et l'inexpérience des pilotes font s'écraser  70  planeurs en  en mer  et disperse 3400 paras a au nord des plages de débarquement prévues sur une zone de 80 km. Cette confusion eut malgré tout un avantage  :  troubler l'ennemi qui  évalue mal la situation sous ce mauvais temps ! Mais ce sera surtout l'état de la mer qui assurera ou non la réussite du débarquement : L'opération Torch rencontre une mer trop agitée avec de nombreuses barges qui coulent. En Sicile  les unités seront dispersées sur la plage en raison de la tempête, ce fut également le cas en Italie, mais non pas  en raison de l'état de la mer, mais, par mauvais choix stratégique.

En Normandie, la préparation fut rigoureuse et intense, peu de reproches sont à faire sur cet aspect. Le choix des plages est satisfaisant sauf pour Omaha qui rappelle trop Gallipolli et Dieppe avec des défenses sur les hauteurs qui  amènent de très lourdes pertes, ce que savait Gerow. 

Une attention particulière et spécifique aurait du être accordée  à cette plage d'autant que l'échec des bombardements aériens était prévisible. Ainsi, il semble inconcevable que l'on puisse faire un énorme double  raté de bombardements sur la plage pour laquelle cela était une nécessité absolue, peut-être les américains eétaient trop sûrs d'eux ? ; il ne semble  pas que l'on ait envisagé  la solution complémentaire de créer  un parachutage à l'arrière d' Omaha qui aurait permis une attaque en tenaille des WN du plateau et assurer une destruction effective de ces bunkers ? fallait-il encore pouvoir le programmer par rapport aux bombardements...

Si le choix de la météo, exécrable début juin 1944, a permis de trouver une fenêtre d'accalmie favorable le  6 juin, les conditions furent, malgré tout, médiocres : le débarquement a beaucoup souffert de l'état de la mer : les chars DD ont coulé, des barges ont chaviré,  et beaucoup de Gi's se sont noyés.  Par contre, il semble que l'analyse des conditions maritimes  locales ait été insuffisante : le courant côtier a fait dériver vers l'est toutes les barges du débarquement et la présence des 'trous d'eau" et de "barres" (pourtant étudiés par les américains) ont  contraint les GI's de les traverser avec de l'eau plus haut que la taille  et ont fait buter les engins amphibies sur ces monticules cachés de sable. En conséquence, de lourdes pertes.


-Tromper.
La surprise du lieu et du moment du débarquement est importante, ainsi les alliés étaient attendus au Maroc. Les résistants furent arrêtés dans la nuit, à 7 h du matin, Casablanca fut survolé par des avions alliés qui couvrirent la ville de tracts, et lorsque la flotte alliée parut à l'horizon, l'escadre et l'armée d'Afrique étaient déjà en état d'alerte.
A Gallipoli pour la première fois un débarquement de diversion  français fut réalisé. Cela fut réédité en Italie  pour l'opération Avalanche : le débarquement principal se déroule a lieu à proximité de Salerne pendant que deux opérations de diversion ont lieu en Calabre (opération Baytown) et à Tarente (opération Slapstick).
Pour la Sicile, un vaste plan d'intoxication fut mené avec succès. Les Alliés réussirent à intoxiquer leurs adversaires grâce à l' « opération Mincemeat » : le 9 mai 1943, le corps d'un (faux) officier anglais, avec de fausses lettres indiquant la Sardaigne et la Grèce comme objectifs combinés du prochain débarquement, avec une opération de diversion sur la Sicile. est découvert sur les côtes sud de l'Espagne. Les Allemands qui croyaient déjà à une invasion de l'Italie du nord furent renforcés dans leurs convictions et déplacèrent des unités blindées et navales vers les fausses cibles.
A noter que l'idée d'employer un cadavre avec de faux documents fut plusieurs fois utilisée, notamment en 1942 pour tromper Rommel en Egypte.

Pour le débarquement, la désinformation et l'intoxication ( "Bodyguard"), en faisant croire que l'opération se déroulerait dans le Pas de Calais (Opération Fortitude) ont été un succès vital pour la réussite du débarquement.

-Se faire aider par la résistance
 ll est utile d'exploiter les renseignements et l'aide fournie par la résistance, ce fut-elle qui permit de l'emporter à Alger. L’Opération Torch en Algérie  n’aurait  pu réussir sans le coup de force, préparé et planifié à l'avance, mené à Alger par une poignée de jeunes résistants. Dans la nuit, 400 jeunes hommes armés de vieux fusils ont réussi à s’emparer des points stratégiques de la ville, à tenir en respect plus de 12 000 soldats de Vichy et ainsi, à ouvrir la voie aux libérateurs. A l'opposé, sa défaillance (arrestations)  fut néfaste  à Oran et au Maroc.
A Salerne, la liaison avec la résistance locale n’a pu être suffisamment établie pour permettre de désigner des objectifs moins bien défendus, des plages plus adéquates pour le débarquement comme les plages de Maiori et d’Amalfi.

Pour le débarquement, la résistance a joué un rôle utile (renseignements, sabotages) mais, difficile  à mesurer... fondamental pour De Gaulle, mais beaucoup  plus nuancé par les historiens,  ainsi  pour  Jean Quellien, professeur à l'Université de Caen. "L'honneur est sauf, ils ont fait ce qu'ils pouvaient... Mais ils ne pouvaient pas faire grand chose". Ce qui est certain , c'est que la résistance  a facilité la libération de la France  ( Voir le dossier)


-Diriger
L'absence de commandement unique se révéla souvent comme un point faible  à Gallipoli, Narvik,  Dieppe, Dakar ainsi que la dilution des responsabilités à Dieppe.  L'expérimentation de la collaboration inter-armes et inter -armée débute en Norvège et se renforcera partout ensuite.  Il faut aussi savoir faire preuve d'autorité, ainsi à Tarawa, dans le pacifique, les soldats refusent d'avancer pour se faire massacrer  pour un îlot... mais aussi à Salerne où certaines unités sans aucune expérience s'enfuient devant l’ennemi dans les lignes américaines et anglaises.
Toutefois, il ne faut pas,  à l'opposé, tomber dans l'arrogance  comme ce fut le cas  à Gallipoli, ni dans de mauvais règlements de compte entre commandements, après un échec, comme en Norvège.

Pour le débarquement, le commandement unique d'Eisenhower et l'organigramme des responsabilités  a été  une grande réussite, surtout face  à l'imbroglio dans le commandement allemand. Toutefois, cela n'a pas empêché les désaccords entre américains et anglais et les critiques  comme pour  Montgomery pour son échec pour libérer Caen...




-Entraîner les troupes
L'inexpérience des troupes est fatale, ce fut le cas à Gallipoli. En effet les stratèges alliés n'envisageaient pas que les débarquements pussent se faire sous le feu des Ottomans et aucun entraînement en ce sens ne fut entrepris. La combativité des défenseurs était également sous-estimée par les Alliés, confirmée par dépliant distribué aux troupes qui indiquait : « De manière générale, les soldats turcs manifestent leur volonté de se rendre en tenant leur fusil à l'envers et en agitant des vêtements ou des haillons de toutes les couleurs. Un véritable drapeau blanc doit être considéré avec la plus profonde suspicion car il est improbable que les soldats turcs possèdent quoi que ce soit de cette couleur ».

Un débarquement se prépare minutieusement, surtout pour les  navigateurs des barges qu'il faut savoir manier avec précision, Ce fut le cas  à Alger,  par manque d’entraînement et d’expérience, beaucoup de barges se retournent en mer entraînant matériel et militaires dans la mort. En Italie l'inexpérience de certaines unités se révéla catastrophique, certains refusant d'aller combattre face au puissant feu ennemi.

L'entrainement fut effectif et intense, d'ailleurs les GI's s'en plaignaient et avaient hâte qu'il cesse ... Cependant à Omaha, les conditions épouvantables et la désorganisation sur le sable  ont ébranlé les premières vagues, ne sachant comment réagir dans un telle situation  effroyable et surtout imprévue.

-Anéantir les défenses ennemies  puis  soutenir le débarquement
Il s'agit d'un aspect crucial pour permettre la réussite d'un débarquement, l'expérience le montre et pourtant systématiquement, le jour du débarquement, en règle générale, les bombardements font des ratés ! Lors du débarquement en Norvège les attaques aériennes  et le soutien aéronaval  par les britanniques est assuré pour la première fois.  A l'opposé, pour  Dieppe aucun bombardement  n'est réalisé puis un manque de soutien aérien a amené  une catastrophe. Les alliés prennent conscience avec cette mauvaise expérience de la nécessité absolue de concentrer  les  bombardements  des navires de soutien et  les attaques aériennes  sur les défenses des lieux de débarquement.

En Sicile,  les bombardements furent surtout préventifs dés avril 1943  puis à nouveau la veille du débarquement avec le pilonnage  des plages siciliennes le 9 juillet 1943. Pour le débarquement qui s'opère dans la nuit du 9 au 10 juillet, les Alliés ont réuni des forces et des moyens considérables : 160 000 hommes, une couverture aérienne de 4 000 avions, 3 200 navires, de nouvelles barges de débarquement. Mais c'est la météo exécrable qui perturbe les troupes aéroportées et provoque de grosses difficultés de navigation pour les avions de transport et de remorquage qui peinent à atteindre leurs cibles.

En Italie, les bombardements ont bien lieu mais  sont  malheureusement  ratés. Aussi, malgré la couverture aérienne en provenance des porte-avions alliés et l’artillerie lourde provenant des cuirassés américains, les objectifs sur les plages ne sont pas atteints et le matériel n’est que partiellement débarqué. (812 véhicules débarqués sur 1 600 et 50 tonnes de matériels sur 1 830) avec une tête de pont de 6 km de profondeur au lieu de 12.
Par contre, un peu plus tard,  à Anzio,  60 escadrilles  (2600 avions) interviennent  en simultané avec  plus d'une centaine de navires de soutien, ce qui fait que le débarquement, en lui même, est réusssi : le soir 36.000 hommes et  3200 véhicules sont débarqués.
A Tarawa, plusieurs escadrilles américaines  de la 7e Air Force se chargent du bombardement sur Betio et les îles alentour, du 13 au 19 novembre. Le 19 novembre, les premiers navires apparaissent au large de Tarawa et commencent le pilonnage des fortifications nippones. Il sera réalisé de même sur les autres îles : Betio,  Baikiri,

Toutefois, le soutien aérien et naval dans les heures et jours qui suivent sont déterminants pour permettre aux troupes d'avancer (Italie, Sicile, Pacifique)

A Omaha, les bombardements du matin du 6 juin sont  un échec total, mais  comme pour tous les autres débarquements, c'est bien l'approche des navires, en fin de matinée,  et des tirs précis sur les défenses ennemies qui ont permis de débloquer une situation  qui frisait la catastrophe.

-Avoir du matériel adapté
Ainsi, sur les plages de Sicile, les premiers véhicules GMC amphibies, les DUKW, font leur apparition avec succès. De plus, les forces navales bénéficient de nouvelles barges permettant aux hommes de débarquer directement sur la plage. Faut-il encore les diriger et les mettre en place correctement, sinon l'échec est garanti (Tarawa)

Le matériel débarqué avait été expérimenté lors des précédents débarquements, il servit utilement d'autant que le matériel était varié et en très grande quantité, au point de bloquer la plage . Seuls les  chars duplex drive peuvent être considérés comme un échec, prévisible car ils n'avaient été testé que lors de conditions météo  calmes.

-Se méfier des contre-attaques
 En Sicile,  la division blindée Goering attaque à  deux reprises la zone de débarquement américaine mais  doit  y renoncer en raison des lourdes pertes. A Gallipoli, en Italie, les contre attaques furent très nombreuses, proches de la réussite parfois, ainsi à Anzio la violente réaction allemande  a failli faire ré embarquer les hommes..  L'expérience montre aussi qu'il vaut mieux progresser sur deux axes pour diviser l'ennemi  (Sicile)  puis réunir ces forces  et les faire converger  pour en finir.

L'opération Fortitude ayant tellement bien fonctionné que les allemands ne surent ni comment, ni où riposter en contre attaquant efficacement. Ce ne sera que plus tard, lors de la bataille de Normandie, que les contre attaques seront virulentes.


-Enfin, sur un front de débarquement toujours étroit,  il faut s'assurer de moyens considérables, d'une puissance  de feu et d'un grand  nombre de soldats pour enfin  réussir, donc continuer  à débarquer des hommes et du matériel, c'est toujours ce qui permet de vaincre même dans des situations difficiles : Opération Torch, Sicile, Italie, Pacifique. C'est la stratégie du marteau pilon qu'il faut employer (comme les allemands à Sedan en 1940). En effet l'ennemi s'épuise avec ses multiples et sanglantes attaques, il  a de lourdes pertes, manque de munitions et de réserves, aussi, tôt ou tard, devra-t-il renoncer et reculer.

Le débarquement avec la mise en place d'une tête de pont, même réduite, ayant abouti, ensuite des milliers d'hommes  et des tonnes de matériel et armes arrivent. Ils permettront aux alliés d'imposer leur puissance de feu et de dominer des allemands épuisés et manquant de reserves et de munitions.


  • Conclusion

Aucun de ces débarquements n'est une réussite, certains sont de véritables échecs, les autres sont laborieux avec  une première phase de débarquement difficile et une  victoire  finale qui nécessite beaucoup d'efforts, de bombardements complémentaires et surtout de lourdes pertes.
Tous ces débarquements de la deuxième guerre mondiale (avant le 6 juin) ont coûté la  perte d'environ 750.000 hommes (sans compter les 188.000 morts de Gallipoli, ni les 1450 hommes lors de l'entraînement  dans l'opération Tiger en 1944, ni les pertes dans le Pacifique).

Si l'on peut comprendre l'existence des erreurs de Gallipoli dues à  l'inexpérience, premier débarquement du XX°, il peut paraître surprenant de voir qu'elles se répètent et qu'on les retrouve, toutes, lors des débarquements  y compris au 6 Juin en Normandie. Mais ce que l'on apprend surtout, au travers de ces multiples expériences,  c'est qu'un débarquement amphibie est une opération très délicate dont la stratégie demeure incertaine tant les aléas sont possibles et redoutables, ensuite la seconde phase du  maintien de la tête de pont  demeure aussi incertaine, parfois proche du désastre (Sicile, Anzio...) si la contre-attaque allemande est puissante car appuyée par des panzers.

Chaque débarquement est spécifique, et les leçons que l'on peut en tirer sont toujours les mêmes : une indispensable et longue  réflexion, une étude approfondie de l'environnement sont d'une nécessité absolue, et, dans tous les cas, il faut savoir que la réussite est aléatoire et qu'un échec est toujours possible. Lors de la conférence de Téhéran (1943)  le Général Marshall déclare : " Un échec de débarquement est une catastrophe car il s'accompagne de la destruction presque totale des navires de débarquement et des troupes engagées.. désormais il se dit  obsédé par la question car  avant le présent conflit, il n'avait jamais connu de bateau de débarquement plus grand qu’un canot gonflable...". Le Maréchal Vorochilov lui répond : " Si l'opération Overlord est lancée sur une côte fortifiée  sans que les défenses soient  détruites peu avant , elle est vouée  à l'échec.  Les positions ennemies doivent d'abord être détruites  par le feu de l'artillerie et les bombardements aériens. Si le débarquement est mené de cette façon, ce sera un brillant succès au lieu d'une catastrophe"
Ce que les généraux savaient, ce qu'appréhendait en particulier Gerow ;   il faut dont être optimiste et réaliste et rejeter le pessimisme !

On est conscient de ces difficultés et des conséquences dramatiques d'un échec qui  retarderait  la libération de la France de plusieurs mois  ou années et donc  permettrait  aux troupes soviétiques de continuer leur avancée en Europe  pour libérer la France, avec des conséquences que  l'on peut, aujourd'hui, imaginer.

Si les retours d"expériences sont utiles et ont permis d'améliorer le matériel,  de mieux entrainer les hommes, d'affiner les préparatifs, cela ne suffit pas pour réussir  à tout coup un débarquement. Peu de choses  peuvent  y nuire : un bombardement raté, une mer déchainée, des courants marins...
Ainsi, il aurait fallu un peu plus de chance pour que le débarquement à Omaha se déroule aussi  facilement qu' à Utah :  tout simplement des bombardements réussis et une mer plus calme.